Loire-Authion, 49

Jules et Roméo

Jeune public, à partir de 13 ans

Théâtre en plein air

0h55

Lieux non dédié, là où la jeunesse se retrouve

M.e.s : Maxime Bizet

Collaboration artistique : Pauline Letourneur

Avec (par ordre alphabétique)

Baptiste Gillis – Nico / Laurent

Benoît Joly – Roméo

Christophe Rouger – Ben / Tyblat

Coralie Tomi – Jules

Marion Vaïtilingom – Max / Paris

Thématiques : Jeunesse / Amour / Amitié / Violence sexiste et sexuelle

Synopsis :

« Deux bandes rivales s’affrontent, face à la violence
D’un homme pour qui ce geste n’a rien d’une agression »

Une petite ville. Deux bandes d’ados. D’un côté, Juliette (que tout le monde appelle Jules), Nico et Tybalt. De l’autre, Roméo, Ben, Max et Laurent. Iels ont 17 ans. Iels sont en guerre froide autour d’une histoire de viol. Pourtant ce soir, il y a une fête et iels vont se croiser. Jules et Roméo vont tomber amoureux.ses. La tension monte, les bandes s’affrontent. Mais cet amour-là, il mérite bien qu’on se batte pour.

Je cherche à mettre en scène notre regard sur l’adolescence.

Les comédien.ne.s et moi, de jeunes adultes, cherchons à saisir l’essence de ce moment de la vie, de cet univers, de ce territoire qu’est l’adolescence : un monde en soi et un espace d’affranchissement de l’enfance et du monde des adultes.

Depuis quelques années, je suis enseignant théâtre auprès de collégien.ne.s et lycéen.ne.s. Pour que ma transmission ne s’effectue pas de manière unilatérale et dominante, je m’astreins à observer et écouter beaucoup mes élèves.

Je suis fasciné par leur univers où tout est à la fois plein de promesses, de nouveautés, de prises de risques, mais aussi de revers douloureux et de grands moments de doutes et de déchirements. Il n’y a rien ici de l’ordre d’un « âge bête » ou d’une folie passagère. Il y a un profond idéalisme, un désir de dépasser les vieux conflits, les schémas préétablis ou les déterminismes sociaux. C’est cet élan que je veux donner à la bande de Jules et Romeo.

Lors de mon master recherche en cinéma, j’ai étudié les films d’horreur, et plus spécifiquement les teen moves, un genre cinématographique majoritairement américain ayant à la fois l’adolescence comme sujet et les adolescent.e.s comme personnages et public. Des films souvent décriés justement parce qu’on leur reproche leur aspect simpliste et populaire – terme qui nécessite sans cesse d’être redéfini et éloigné de sa signification péjorative. Ces films – et je ne suis pas le seul à avoir écrit sur le sujet – parlent surtout de l’opposition philosophique entre ces adolescent.e.s et le vieux monde des adultes qui menace littéralement de les tuer. Que la conclusion soit heureuse ou pas, il y a une lutte à mener, parfois désespérée, mais toujours pleine d’allant propre à l’adolescence. Ce combat en tout cas, n’est jamais mené en complicité avec les adultes.

Les ados sont seul.e.s face au(x) « monstre(s) ».

Dans Jules & Romeo, je fais disparaître les adultes. Iels n’existent plus dans la fable ou alors ielles sont devenu.e.s des jeunes gens, comme c’est le cas pour Frère Laurent, devenu Laurent, un bon ami de Romeo ou la nourrice, devenu Nico, meilleur ami de Jules. Il s’agit d’évacuer les modèles, de libérer l’espace aux corps et à la parole des adolescent.e.s. Iels forment une communauté en autarcie, avec ses propres règles. Aucun.e adulte pour les arrêter, pour les empêcher d’être. Dans Jules & Roméo, les adultes sont absent.e.s. Ils n’existent plus dans la fable ou alors ielles sont devenu.e.s des jeunes gens, comme c’est le cas pour Frère Laurent, devenu Laurent, un bon ami de Roméo ou la nourrice, devenu Nico, meilleur ami de Jules. Il s’agit d’évacuer les modèles, de libérer l’espace aux corps et à la parole des adolescent.e.s. Ils forment une communauté en autarcie, avec ses propres règles. Aucun.e adulte pour les arrêter, pour les empêcher d’être.

« L’absence de parents est un parti pris. J’ai voulu évacuer la figure parentale pour
ne pas tomber dans le stéréotype des parents qui représentent la loi. Je préférais me
concentrer sur ce que vivent les trois filles du film. […] je ne laisse pas le choix aux
spectateurs, ils sont obligés de s’identifier aux personnages. Tout le monde, dans la
salle, doit être une fille de 15 ans.
»

Céline Sciamma, Naissance des pieuvres

Dans Roméo et Juliette, la tragédie s’incarne dans la lutte entre Montaigu et Capulet. Une guerre ancestrale entre deux familles conduisant de manière irrémédiable à la mort des personnages. En conservant la fable au travers de ces personnages adolescent.e.s, et en l’amenant dans notre époque, le drame se substitue à la tragédie.

C’est le viol et le passage à tabac de deux jeunes femmes qui devient le nœud gordien des affrontements.

La mort qui rode n’a rien d’une fatalité. Elle est la conséquence d’actes et de choix. Ainsi le personnage de Mercutio devient une jeune femme, Max. Sa bisexualité, son assurance sexuelle, son caractère affirmé sont autant d’arguments justifiant qu’on la fasse taire aux yeux de Tybalt.

On parle ici de problématiques prégnantes pour les adolescent.e.s, autant celleux que nous avons enté que celleux que je rencontre encore aujourd’hui. C’est une question que je veux aborder frontalement, celle de la violence de genre qui caractérise les agressions sexuelles et sexistes. C’est sur cette base que se construit la nouvelle opposition entre la nouvelle Mercutio (Max) et Tybalt. Et c’est le point de tension de la pièce.

« L’intérêt des contes d’horreur tient peut-être au fait qu’ils font monter le
désespoir à la surface, qu’ils nous forcent à l’affronter au lieu de le laisser nous miner
souterrainement de manière insidieuse. »

Starhawk, Rêver l’obscur, femmes, magie et politique

La pièce ouvre une porte par laquelle on peut voir le monde des adolescent.e.s. Nous cherchons comment les spectateurs.trices pourraient les observer à la dérobée, se projeter en eux et en leur histoire. Pour faciliter cette immersion, il me semble important de créer un territoire pour les personnages. Une marge où vont les ados pour s’éloigner des adultes et de leurs avatars (le lycée, le foyer).

De ces deux idées, est né le désir à la fois d’un théâtre déambulatoire et hors les murs.

Le.a spectateur.trice est invité.e à suivre un parcours allant d’une scène à l’autre. Ces segments sont situés dans des espaces renvoyant aux lieux de rendez-vous des adolescent.e.s en extérieur. Comme dans la vie, ces lieux peuvent sembler anodins et ce qui s’y joue n’a rien de spectaculaire en apparence. Pour autant, c’est ce décalage entre la discussion intime et anodine et la puissance évocatrice des lieux qui amène la théâtralité.

Je viens d’une petite ville de Touraine. Durant mes années collège puis lycée, on se retrouvait entre ami.e.s aux arrêts de bus, sur les parkings, dans les skate-parks, sur les places de la ville. Des lieux investis par les conversations sur nos vies, nos amours, nos amitiés, nos projets, devenant par là-même des refuges, des espaces de liberté de parole. C’est cette sensation que je veux donner à voir, et dans laquelle je veux plonger les comédien.ne.s.

Maxime Bizet